Bonjour à tous,
Ce que je vous propose est un peu différent des sujets habituels du forum et s’apparente plutôt à une sorte de mini étude sur Overwatch, sa commnauté et, surtout, la communication existante.
Ce qui suit risque d’être long, pas forcément très facile à comprendre, mais devrait être intéressant – je l’espère ! – et pourrait apporter quelques lumières sur nos comportements in game et, finalement, notre toxicité.
Attention, je ne prétend pas avoir tout compris et pouvoir régler la toxicité d’un coup de baguette magique, ce qui suit est simplement le rendu d’une petite analyse que j’ai menée sur Overwatch sur mon temps libre et n’a aucune vocation scientifique ou autre.
Commençons rapidement par un contexte en deux-trois lignes : j’ai suivi des études de communication (qu’est-ce que la communication, comment celle-ce se crée, etc.) et, pour mon mémoire de fin d’études, j’ai mené une étude sur Steam et Steamworks durant un an afin de comprendre les mécaniques de communication de la plateforme (grosso modo). J’ai donc étudié rapidement la communauté et la façon dont celle-ci s’exprimait et était prise en compte sur Steam et Steamworks.
Et comme c’est un sujet qui, mine de rien, m’intéresse, j’ai mené une petite étude sur Overwatch et sa communauté. Je ne vous servirai pas un plan en 3 parties avec intro et conclusion, mais si je devais choisir une problématique ce serait celle de la légitimité sur Overwatch.
Avant de commencer : je dois préciser que je joue sur PC, en équipe, pas de try hard. Toutes mes remarques sur les rageux/toxiques ou sur les versions consoles proviendront uniquement de ce que j’ai lu sur le forum (ou ce qu’on m’a dit). Je serais donc ravie de lire vos retours et d’en discuter avec vous
Puisque nous allons parler de communication au sein d’un jeu, il est important de commencer par définir “l’espace de communication” ou “espace de prise de parole”.
On peut penser que, cet espace de communication, c’est le chat (vocal ou écrit - sur PC du moins). Cependant il s’agit de canaux de communication ainsi que nous le verrons.
Ainsi, l’espace de prise de parole d’Overwatch c’est Overwatch en intégralité puisque l’on peut accéder aux chats aussi bien depuis les menus que in game (sur PC, le cas des consoles est différent, j’en parlerai rapidement).
Sauf que le chat général ne sert pas à grand chose en fait et que, comme Overwatch est un jeu, la communication entre joueurs se produit essentiellement durant les parties. L’espace de prise de parole est donc une partie (arcade/QP/rank).
En fonction du type de partie, la nécessité de communiquer est différente : en rank elle est primordiale, en QP nécesaire, et en arcade elle est aléatoire pour ne pas dire facultative (mais elle existe quand même). Les conditions entre le rank et le QP étant différentes, on partira du principe qu’une partie c’est : deux équipes composées de 6 joueurs qui s’opposent sur une map aléatoire dans un temps imparti pour gagner. Chaque équipe étant composée de DPS, Healer et Tank.
Le jeu propose un premier niveau d’outils (ou canaux) pour communiquer : chat écrit, chat vocal (uniquement sur PC), et des phrases pré-enregistrées (i>group up, i need healing, thanks, ultimate status).
Ces différents outils permettent et encouragent la communication des joueurs entre eux. D’ailleurs quand on clique sur une de ces phrases préenregistrées en regardant un membre de son équipe, il sera affiché “[X] to [Y] : I need healing” (par exemple).
Il existe un second niveau qui relève d’un détournement de fonction d’outils par les joueurs : les voicelines et emotes.
Ces outils sont là pour approfondir les personnages, pour avoir un aspect de collection mais sont utilisé par les joueurs pour communiquer. On va alors trouver des joueurs qui vont échanger leurs voicelines ou leurs emotes dans un but de partager, donc de communiquer.
Le cas des consoles est différent car il n’y a pas de chat : une autre forme de communication va alors se créer. On m’a raconté que, par exemple, pendant l’écran de sélection des rôles, on allait spammer tel héros pour indiquer qu’il fallait le prendre. On est ici dans un détournement (utiliser la sélection des héros pour faire passer un message) dans le but de communiquer.
On constate ici que la communication permise et encouragée par Blizzard est une communication d’équipe, de communauté : la communication au service du jeu. On a la possibilité de ne pas communiquer (désactiver les raccourcis pour les phrases, retirer les chats, ignorer les autres) mais on va se retrouver bloqué car à un moment donné il faudra communiquer pour avancer (ne serait que demander du soin !)
Cependant Overwatch est un jeu social (on est en équipe) qui donne la possibilité d’avoir des contacts, de créer des équipes, etc. Et puisqu’il s’agit d’une communauté, des mécaniques sociales et communautaires vont entrer en jeu, dont celle du droit à la parole
Ce droit à la parole s’applique à chacun au sein de la communauté, mais pour comprendre comment cela fonctionne on va se pencher dessus au niveau d’une partie, et plus particulièrement au niveau d’une équipe.
Dans une société hiérarchisée telle que celle d’Overwatch le droit à la parole s’applique : il s’agit de reconnaître socialement ceux qui ont le droit de s’exprimer, et de reconnaître la valeur de leur parole (les politiciens, les professeurs, les savants, etc.). Pour avoir le droit de s’exprimer, ces personnes ont gagné leur droit à la parole en accomplissant différents actes (devenir le leader d’un parti politique, avoir un diplôme d’enseignant, être expert sur un sujet en particulier). Ces actes, reconnus par la société, leur confèrent donc un droit de parole.
Sur Overwatch c’est plus ou moins similaire, cependant nos actes sont plus ou moins cachés et relèvent de différents critères : le rôle choisi, nos statistiques personnelles, notre façon de jouer, notre niveau général, notre rang et notre niveau de recommandation.
Tout d’abord le rôle que l’on choisi : si l’on insta pick un heal ou un tank, notre équipe nous encouragera et nous donnera le droit à la parole, tandis que les DPS se voient presque renié ce droit à la parole : si un heal demande un tank ou un pick précis, il sera plus facilement écouté qu’un DPS. Le DPS devra alors justifier son choix et invoquera ses statistiques personnelles pour prouver qu’il a le droit de jouer ce héros, et donc de s’exprimer (c’est exactement ce que j’ai fait au début de ce message !).
La partie commence, le DPS a le droit de jouer son pick mais malheureusement sa façon de jouer n’est pas celle que l’on attend de lui (pour X ou Y raison), son équipe va donc lui retirer le droit à la parole et lui demander de changer, lui imposant par là de s’exprimer différemment. (Pour rendre la chose plus crédible, imaginez qu’il s’agisse d’un Hanzo, une Widow, un Torbjorn ou une Symmetra )
On voit ici que notre droit à la parole dépend donc du rôle que l’on choisi et de nos compétences. Mais il faut également prendre en compte nos différents niveaux.
Le niveau général témoigne du temps que l’on a passé sur le jeu, de l’expérience gagnée. Plus notre niveau est élevé, plus il est attendu de nous que nous connaissons le jeu, ses stratégies, ses maps, etc. Et lorsque quelqu’un niveau 500 (par exemple) n’est pas à la hauteur de ce qu’on attend de lui, on lui retirera son droit à la parole en ne le prenant pas forcément au sérieux.
Arrive ensuite notre niveau en rank, qui, même s’il n’est pas lié à notre niveau principal, l’attente est pourtant la même, voire plus grande encore. Et si un platine joue moins bien qu’un bronze, on écoutera quand même le platine à cause de son rang. (Et un level 500 en bronze ? soit on se moque un peu de lui soit on a des doutes – à creuser ).
Les niveaux de recommandation sont arrivés trop récemment pour être réellement pris en compte, il va falloir attendre de voir si on s’en sert réellement ou si c’est juste de l’hypocrisie comme certains le pensent. Ou si, tout simplement, cet outil est utilisé différemment que ce qui est prévu : les heals et les tanks reçoivent plus souvent des recommandations.
On en arrive maintenant à la toxicité. Si on reste dans cette pensée du droit à la parole, la toxicité naît d’un déséquilibre du droit à la parole.
On a le cas de celui qui se croit bien plus légitime à prendre la parole que les autres et ça donne des “f*cking noob” ou des “wtf is heal???”. Il ne reconnait pas le droit à la parole de ses teammates.
On va avoir le cas de celui qui se sait (?) illégitime par rapport aux autres (mauvais pick qui n’aurait pas été accepté par l’équipe par exemple) et qui va prendre son droit à la parole par la force. S’en suivront des insultes afin de rabaisser les autres pour leur renier leur droit à la parole et ainsi légitimer le sien.
Après bien sûr on a tous les autres cas : racisme, misogynie, homophobie, se moquer à cause d’un accent, etc.
Et puis vient la toxicité car tel ou tel équipier n’est pas sur le chat/refuse de communiquer (et donc le report). Mais dans ce cas-là, c’est simplement que la personne refuse de communiquer et préfère rester dans une pratique individuelle plutôt que communautaire, il est dans son droit (sauf s’il AFK ou meurt en boucle, auquel cas c’est un refus total de toute pratique de jeu – ce qui peut être une forme de communication en soit, mais pas celle que l’on attend)
Après, on a d’autres petits cas comme l’interprétation des pratiques (la sacro-sainte META par exemple) et de la prise de parole des autres (le “t’es bon tu montes” et autres Youtube-series).
On a aussi l’extension de la prise de parole avec les forums : prenons l’exemple du forum officiel. Les données in game s’appliquent aussi ici mais s’y ajoutent d’autres données (le nombre de messages, les likes, etc.) ce qui donne à certains une impression de “prise de haut” car considérés comme plus légitimes pour s’exprimer (certains ce reconnaîtront ).
Et tout ça pour quoi finalement ?
Différents sujets : les ranks au lvl 25 ? les smurfs ? les alt ?
Dans le cas de ceux-ci, on a un déséquilibre, car ce sont des gens considérés comme “n’ayant pas forcément le droit à la parole” (bas rank, faible niveau, etc.) qui s’avèrent avoir une plus grande légitimité car ils ont un autre compte qui reflète bien mieux leurs actions/leur droit à la parole (les fameux mains comptes).
La question des mains également peut être plus ou moins posée selon ce prisme du droit à la parole et apporter une certaine légitimité aux joueurs. La question des OTP aussi qui devient alors une forme de négation de droit à la parole (tu OTP Mercy et personne d’autre) dans un cas extrême.
Voilà voilà merci à vous d’avoir (tout) lu, vous êtes des champions !
Si vous avez des avis, des questions, des témoignages ou si vous voulez en discuter, n’hésitez pas !