Un jour, un lieu, un souvenir...

Le journal du Crépuscule

J’aime bien Silithus. Sauf les tempêtes de sable, les créatures agressives et infectes à cuisiner, les adorateurs de cultes élémentaires qui ont implanté des campements un peu partout, sans parler de ces foutus insectes qui semblent grouiller autour du moindre cristal géant.

Bon, en fait, non, je n’aime pas trop Silithus.

Mais je dois reconnaître que, lorsque j’ai besoin de minerais de qualité, cette région n’a pas son pareil. Dommage que les endroits les plus intéressants soient aussi les plus mal famés.

https://drive.google.com/open?id=1o-cCr13FY59mzmBadkYH2m9vMj3gYwkM

Un riche filon de thorium me nargue, à cinquante pieds d’ici, niché dans un coin de falaise, surplombant la Ruche’Zora. Je cherche du regard le meilleur moyen de l’atteindre, sans attirer l’attention des monstrueuses guêpes qui le voisinent.

Subitement, une voix susurre à mon oreille : « Dis, p’tit chou, tu pourrais nous aider ? »

Je sursaute de surprise, et manque de me cogner au visage de l’elfe au regard narquois, accroupi à deux pas de moi, qui sort subitement des ombres. Un peu en retrait, un de ses semblables, un guerrier accompli, si j’en juge par sa lourde armure de plaques et son bouclier cabossé, me fait signe, un sourire en coin.

Ils ont repéré une cible alléchante, mais craignent de ne pas faire le poids, et sollicitent des renforts pour réussir leur coup.

Un peu plus loin, dans le désert profond, ils ont traqué un prophète du Crépuscule, qui, au vu de son escorte, doit être un personnage très important. Sa mise à mort leur rapportera sans doute beaucoup d’honneur auprès du Cercle cénarien local.

Les termes du service sont vite conclus : à moi l’or et les étoffes runiques, à eux tout le reste.

Nous enfourchons nos montures, et je suis mes deux nouveaux compagnons de route, plein nord, esquivant de mon mieux les Cinglepierres et les Térébrants.

Nous arrivons rapidement en vue d’une patrouille imposante, que nous suivons à une bonne dune de distance, afin de ne pas attirer leur attention.

Une humaine de grande taille, aux cheveux gris, accoutrée comme une démoniste, est ceinte d’un singulier bandeau rouge vif lui masquant les yeux. Quatre paires de bras, orcs et morts-vivants, tous hérissés de maille et d’acier, la précèdent, une masse de bataille dans chaque main. Ceux-là ne doivent pas rigoler tous les jours.

https://drive.google.com/open?id=1eoKjolYr1Bc6ESEC2V8Hq_8uU3ls3XaX

Nous affinons notre plan d’attaque. Le voleur et moi nous approchons subrepticement du groupe, pour assommer simultanément deux des massiers, juste avant que le guerrier n’en charge un troisième. Étourdi par l’impact, celui-ci met quelques instants avant de réagir, tandis que son dernier acolyte se jette vivement sur l’intrus.

Le premier elfe s’approche sournoisement de la cible, et déchaîne ses dagues dans son dos, lui lacérant les muscles au niveau du bassin et de la nuque. Je me joins rapidement à lui, afin d’abattre le premier adversaire.

Pendant ce temps, la prophète n’est pas en reste, et prend part à l’affrontement, à notre étonnement. Ces fanatiques n’ont décidément peur de rien ! Le guerrier s’efforce de contenir leur attention, parant de son mieux les coups brutaux portés par les sectateurs du Crépuscule. Son bouclier manque de se briser à plusieurs reprises, et plusieurs coups mal ajustés lui infligent de sévères contusions.

De notre côté, nous accélérons autant que possible notre ballet de lames, afin d’en finir avec cette racaille enragée qui ne semble pas vouloir mourir facilement.

Le dernier corps se tétanise à son tour, après avoir gratté le sable de ses ongles brisés, dans une dernière convulsion. L’heure de la victoire sonne.
Les elfes se lancent des congratulations à n’en plus finir, et pansent leurs blessures, tandis que je me charge de la seule chose intéressante : fouiller les cadavres. La récolte est jubilatoire : huit étoffes runiques, une brassée de papiers codés, une potion de mana majeure, et près de quarante pièces d’argent. J’exulte !

Enjouée par le tour que prend l’aventure, je laisse volontiers la fiole de mana aux deux grandes perches. Peu d’efforts, grande richesse. Je tends au guerrier la pile de papiers froissés, aux symboles strictement indéchiffrables. Ces textes du crépuscule cryptés ne leur seront d’aucune utilité, j’imagine. Mais un contrat est un contrat. Leur visage ne laisse rien transparaître, mais ils doivent être terriblement déçus.

Après des salutations à la mode de chez eux, à coup d’Elune-je-sais-plus-quoi, les elfes me quittent. Ils n’ont même pas pris le temps de récupérer un morceau de la prophète ; main, tête ensanglantée, ou mèche de cheveux, afin de prouver son exécution aux druides. J’ai comme un doute…

Déterminée à tirer cela au clair, je recherche leurs traces, dans le sable, avant que le vent ne les fasse disparaître. La précipitation avec laquelle l’elfe a fourré les feuillets dans sa besace, comme un document précieux à ne pas laisser à l’air libre, ne cesse désormais de m’occuper l’esprit.

Ils ont filé droit à l’est. Le village maudit de Sudevent ? Non. Toujours plus à l’est. Je peine à retrouver leur piste, mais, bientôt, leurs tigres sont en vue, au repos, près d’une falaise à pic. Je m’approche doucement, jusqu’à découvrir l’entrée d’une caverne, cachée par les reliefs.

https://drive.google.com/open?id=1r3MkzqmXQ51ry_mpgqFEnwkc8moV101N

Peu après, je les vois en sortir, l’air gaillard, s’esclaffant à n’en plus finir. Je n’interviens pas et reste tapie dans un coin.

J’ai bien l’impression de m’être faite avoir… J’attendrai qu’ils soient partis pour aller résoudre cette énigme. C’est pire qu’une trahison. C’est un affront à mon sens élémentaire de la fourberie.

Seradane

Il fait un temps à ne pas mettre un chouettard dehors. Belle idée, tiens, de se dire que la pluie m’évitera facilement des mauvaises rencontres, et que la chasse aux filons sera plus lucrative !

Une mèche de cheveux agglutinés balaie mon visage, gênant ma vue. Ma veste est trempée à l’extrême. À chaque fois que je relève la tête, j’ai l’impression qu’une cascade gelée dévale ma colonne vertébrale. J’ai froid… Toutes ces foutues conditions à subir pour mieux trouver du mithril… Je t’en foutrai, du mithril, moi !

Je trouve provisoirement refuge à l’entrée de la grotte du rocher de l’Affût, entre deux averses d’une rare violence. Je compte me réconforter avec un pain de maïs moelleux, mais mon dépit ne fait que s’accroître. Ma besace est aussi humide que le reste, et mes rations de campagne se délitent entre mes doigts. J’ai envie de pleurer. Qu’est-ce qu’ils peuvent bien y trouver de vivable, les nains des collines, dans ces foutus Hinterlands ?

Je jette un œil à l’extérieur. La tempête se fait ondée. Il est peut-être temps de repartir, et tant pis pour l’estomac creux. À l’est, un pont de corde amani traverse la rivière, en direction de Seradane. Je n’ai encore jamais osé mettre les pieds là-bas. J’ai entendu toutes sortes de rumeurs sur cet endroit.

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Les planches moisies et vermoulues glissent sous mes pas. J’aimerais bien que les cordages ne choisissent pas cet instant pour craquer. Le cours du torrent, gonflé par les ruissellements abondants de la journée, est plus impétueux que jamais. Si je tombe, je n’aurai aucune chance de parvenir à rejoindre la rive.

Plus que six pas.

Plus que trois.

C’est bon !

Je passe sous l’arche de pierre en piteux état, pour débarquer dans une vaste plaine verdoyante, au milieu de laquelle un arbre absolument gigantesque a pris racine. Les restes d’architecture trolle font désormais place à des ruines de style kaldorei. Elle doivent remonter à des temps immémoriaux ! Pas le moindre signe de restauration depuis au moins des siècles.

J’avance aussi discrètement que possible, sous la pluie qui s’est remise à battre violemment. Floc, floc ! Les chaussures de cuir imbibées d’eau, ce n’est la panacée ni pour le confort, ni pour la furtivité.

Quelques mouvements dans le brouillard environnant. Des groupes de draconiens verts patrouillent autour de l’immense rampe ascendante en marbre, conduisant au tronc de l’arbre central. Sentinelles oubliées d’un monde perdu ?

De vieux racontars de taverne prétendent que l’endroit cache un portail menant au Rêve d’émeraude, et même que les plus hardis, ou les plus fous qui s’en sont approchés, se sont retrouvés face à l’un ou l’autre des lieutenants d’Ysera, les terribles dragons d’émeraude.

Je ne suis pas assez stupide pour accorder foi à de telles sornettes.

Je ne suis pas non plus assez idiote pour aller vérifier par moi-même ce qu’il en est. Aucune de ces histoires ne parle de richesse ou de montagne d’or. Je n’ai donc pas de raison rationnellement valable pour aller risquer ma peau en haut de ces marches.

Je contourne chacune des ruines, à la recherche de mines inexploitées. Les gardiens sylvestres ne doivent certainement pas en avoir l’utilité. Mais, peine perdue, je ne trouve pas le moindre monticule de fer ou de mithril.

Progressant vers le nord, une petite lueur rouge attire mon attention, dans la brume environnante. Je m’approche. Une étrange flamme vive crépite devant une stèle dressée, polie par le temps, et exempte de toute marque.

https://drive.google.com/open?id=1ISoi18Zrao-8m3ArQWoO8QvJI75Imtxs

La curiosité me perd une fois encore, et je passe un bon quart d’heure à inspecter cette anomalie, sans pouvoir en tirer la moindre information, ni la moindre idée de monétisation possible.

Le sol se met à trembler. Des pas lourds se rapprochent dans mon dos, tandis que des incantations scandées me font frissonner. Un groupe de draconiens de Verdantis m’a repérée, et s’apprête à me régler mon compte. L’évaluation de leur puissance est vite faite : ma seule échappatoire est la fuite la plus rapide possible.

Sans réfléchir, je me précipite dans le sens opposé, grimpant vers les hauteurs, espérant semer mes assaillants. Je crois que je n’ai jamais sprinté aussi vite de toute ma vie !

Je ne me retourne pas. Quand le bruit de la poursuite semble s’interrompre, je continue ma course pendant encore quelques bonnes minutes. On n’est jamais trop prudents. La montée est raide. J’aborde un virage sur la gauche, et atteins une petite clairière.

Si je m’étais attendue à ça !

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Un grand cercle de pierres, similaires à celle repérée dans la plaine, occupe tout l’espace de ce plateau. Un crâne de dragon en orne le centre. Face à moi, la base d’une des stèles nage dans une curieuse lueur bleutée.

Je ne sais pas quoi penser de cet endroit.

Ou, plutôt, si. Je sais exactement quoi en penser : je ferais mieux de ne jamais en parler. Personne ne me croira, et on ajoutera ça à la multitude des légendes d’ivrognes tavernières de Hurlevent. Et mieux vaut se taire que passer pour une alcoolique !

Escapade aux Tarides

Encore un plan qui a mal tourné. Nous aurions mieux fait de ne pas attaquer la Croisée.

Au début, je trouvais l’aventure palpitante : quoi de plus exaltant qu’un raid vengeur, sur les arrières-bases de l’ennemi, pour le forcer à être aux aguets partout ?

Mais c’était sans doute trop classique, et ils y étaient préparés. Ou pire, nous avons été trahis et quelqu’un les avait informés. Peu importe, le résultat ne changera plus.

Sur les huit du groupe initial, nous ne sommes plus que trois. Le vent a tourné.

https://drive.google.com/open?id=1gbrNpcIzEdE2BHRQW9CRg_dF0ke56Hsv

Au premier assaut, nous n’avons pas rencontré de résistance sérieuse. Tout au plus, avons-nous effrayé un trio de trolls déguenillés aux outils rudimentaires, qui se sont enfuis à toutes jambes, vers le sud, hurlant d’effroi. « K ek, kek, kek » , criaient-ils. Sans doute un code d’alerte pour leurs congénères.

Une fois quelques gardes abattus, et les rares civils éparpillés, nous pensions à un butin facile, et à un avertissement qui ferait frémir les prochains membres de la Horde qui débarqueraient dans le village dévasté. Quel excès de confiance ! Nous n’avions pas fini de visiter la dernière fichue cahutte en terre, qu’ils ont débarqué en nombre.

Au milieu des fourrages piétinés du nichoir à wyvernes, une troupe complète de taurens venait de prendre pied. Équipés d’armures robustes et de haches aux tranchants effilés, ils n’ont pas eu besoin de plus d’une dizaine de secondes de concertation pour nous repousser. De véritables professionnels.

Nos prêtres ont été les premières victimes. Le paladin, dans toute sa ferveur, a supplié la Lumière de le protéger, jusqu’à ce que celle-ci forme une bulle de protection infranchissable tout autour de lui. Les brutes sanguinaires se sont réunies autour de lui, un sourire narquois aux lèvres, attendant la fin de l’effet. Je ne sais combien de temps cela a duré. Je me suis échappée tant que leur attention était détournée.

Quittant le campement par la porte orientale, je ne manque cependant pas de jeter quelques tisons sur les toitures de toile, et ma dernière torche grésillante termine au pied des parois du grenier à blé. Que cette expédition ne soit pas totalement vaine. En chemin, je trébuche sur le cadavre de notre chasseur. Je ne l’avais pas vu se faire tuer. Son corps est encore chaud. Je ne prends pas le temps de m’arrêter. À la guerre, il y a toujours des pertes imprévues. Le mot d’ordre est passé de lui-même : sauve-qui-peut.

Quelques adversaires talonnent le mage et la guerrière elfe, qui se dirigent droit dans ma direction. Ils sont très rapides, et leurs poursuivants ne le sont pas moins. Je quitte les ombres pour accélérer le rythme, et ne pas me faire piétiner. Je leur fais signe, et pointe du doigt vers les collines.

Les taurens sont réputés pour leur endurance, mais je n’ai jamais entendu dire qu’ils étaient des grimpeurs d’exception. Un rapport avec leurs sabots, peut-être. On a l’allure moins sûre quand le moindre petit pierrier glisse sous vos bottes.

Un cri de douleur, et des exclamations de joie derrière moi. Le mage a pris une flèche. Les autres vont le réduire en charpie. Je ne me retourne pas. Je ne sais même pas si l’elfe me suit encore. Je n’entends que le frottement de mes pas précipités, ma respiration forte et haletante, face au coteau trop raide, et mon cœur qui bat à tout rompre.

Quelques trotteurs sauvages, perdus à flanc de montagne, sont effarouchés par mon passage. Ils ne doivent pas souvent voir des gnomes, par ici.

J’atteins bientôt le sommet de la montagne. La traque doit avoir cessé. Je reste tout de même aux aguets : les falaises sont abruptes, dépourvues de toute végétation. Je les verrai venir de loin s’ils sont encore sur ma piste.

Sur un léger promontoire, au sud, un grand feu est allumé. Il y a donc des autochtones vivant à cette altitude ?

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Une forge rudimentaire, une enclume, quelques fournitures disparates autour d’un abri de fortune… l’orc vivant ici ne semble ni féroce, ni hostile. Pour tout dire, il semble clairement coupé des soubresauts du monde d’en-bas. Je le lacérerais volontiers de quelques coups de dague dans son sale cuir verdâtre, pour me déstresser de notre pitoyable débandade. Mais les bruits de combat pourraient relancer l’alerte. Les sons portent très loin, dans les plaines des Tarides.

Je remonte à l’extrémité du belvédère. C’est un véritable panorama à trois cent soixante degrés qui m’entoure.

Au sud-est, je devine Cabestan, cachée par les collines. Puis la Côte des marchands… doux patronyme, pour les flibustiers des mers du Sud qui y ont trouvé refuge, tenant tête aux cartels gobelins.
Dans le prolongement, l’escalier des marées, où une drôle de taurène chamane avait invoqué des esprits marins, pour m’aider à purifier de l’eau souillée de Gangrebois. J’ai l’impression que cela remonte à des lustres.

Encore plus au large, une tâche sombre, vers la mer. Sans doute l’île de la Dispute, dont m’a parlé Ravelle. Elle a beau prétendre avoir subi des épreuves guerrières là-bas, je me demande encore comment elle aurait atteint l’endroit sans se noyer.

Une zone plus claire, contre la cordillère sud. Certainement les épaisses et hautes murailles grises du Fort du Nord.

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L’Alliance est donc bien présente ici, et n’en rougit pas ! Ces soldats de Theramore, restés fidèles à feu l’amiral Portvaillant, continuent de tenir tête à la Horde, n’en déplaise à certains. Cette endroit doit redevenir un caillou dans la botte de Thrall. Orgrimmar ne doit pas avoir l’esprit tranquille, à cause des assauts qui peuvent surgir de ce bastion de premier ordre.

Je devine un avenir pas si lointain, où cet endroit sera à nouveau le théâtre d’affrontements sanglants…

Le ponton de Quel’Thalas

« Pas chiche ! »

Buchette, pour une fois, encore, tu n’aurais pas pu te décider à fermer ta grande gu**le ?

C’était peut-être la date anniversaire, mais il n’y avait pas lieu de fêter ça. En aucune manière. Promis : demain, j’arrête l’alcool et je ne bois plus que du lait glacé.

Ici aussi, la Grande mer est glacée. Le Norfendre est évidemment invisible à l’horizon, mais les courants marins doivent en venir directement, pour lécher nos côtes et les rafraîchir. Je me pèle, mais ça me servira de leçon.

C’est le seul moyen d’accès que je connaisse, de toute manière. La voie terrestre pour le Quel’Thalas, au nord des Maleterres de l’Est, est aujourd’hui impraticable, obstruée par un éboulement. Sont-ce les Hauts-Elfes qui ont tenté vainement de bloquer ainsi la progression du Fléau ? Ou bien les colonnes de machines de guerre ont fait trembler la terre jusqu’à provoquer l’effondrement des montagnes ? Peu importe. Personne de sain d’esprit ne voudrait retourner là-bas.

Alors pourquoi je m’entête, les pieds trempés, à longer la plage des clairières de Tirisfal ?

Surtout, ne pas faire demi-tour. Quand on a des principes, on ne change pas d’avis. Il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’… Ouais, et puis zut. J’assume.

Au bout de quelques heures, la tour sin’dorei est en vue.

https://drive.google.com/open?id=1vHlMz2ApftcGL4wglErB_fNVDGeSMrWK

Je reconnais le bâtiment de loin. Je suis déjà venue ici, une seule fois.

Ils l’ont retrouvée après trois semaines de recherches. Un accident de pêche, ils ont dit. Le froid a conservé la dépouille d’une manière inhabituelle, ils ont rajouté. Mais pourquoi être venue ici, ont-ils demandé ?

Aujourd’hui, je connais la réponse.

On n’a pas tous un profil de héros. Et, de toute manière, dans la vraie vie, les héros sont ceux qui meurent en premier.

C’était donc ça qu’elle voulait ? Merci pour la confidence et la confiance. Et surtout, à jamais !

Je me doutais depuis un moment qu’un truc pas net lui trottait dans la tête. Mais de là à se frotter à des idées pareilles… Elle a voulu jouer avec le feu, et elle a fini givrée.

Oui, je n’ai pas mieux que l’humour stérile pour contrer le frisson qui me remonte le long de l’échine. Transformée en chevalier de la mort. Brrrrr.

Je scrute l’horizon depuis le ponton presque immergé, observant l’immensité de la mer et de ma solitude.

https://drive.google.com/open?id=1-knHYirJzVQN79VKHZInIN31Bn7VwaYU

Des remords ? Je ne pense pas. Des regrets, alors ? Pourquoi être revenue ?

Je fais un tour sur moi-même. Personne, évidemment. Quels sont donc ces spectres qui me hantent ? La mauvaise conscience, en cadeau d’adieu ?

Très bien. Alors pour l’amour des titans, asseyons-nous au sol, et racontons-nous donc les tristes histoires de morts royales.

Llane Wrynn, lâchement abattu par Garona ? Tu as cru pouvoir t’assimiler à lui, dans la guerre contre la Horde, que tu n’as pas manquée de perdre ?

Terenas Menethil, sommairement exécuté par son propre fils ? Pour vaincre au combat, tu a pensé que toutes les extrémités étaient envisageables ?

Arathor, vaincu par son excès de curiosité ? Et puis quoi encore ? Tu pensais pouvoir éradiquer les trolls à toi toute seule, et forcer le respect de l’Alliance ? Le seul mur que tu as bâti était celui de ton obstination crasse. Ça doit être un trait de famille.

Varian Wrynn, disparu en haute mer lors d’un voyage diplomatique ? Tu as pensé que ton propre sacrifice aurait une répercussion sur le cours des choses ? Quelle vanité !

Ni toi, ni moi, n’avons fréquenté ces hommes. Je doute que tu les aies aperçus un jour, même de loin. Leur pouvoir, leur puissance était bien au-delà de notre portée. Nous ne sommes pas fait de ce bois-là. Insignifiantes, c’est tout ce que nous devions être. Tu pensais t’élever, mais notre action participe à l’effort commun sans retenir nos noms. Ce n’est pas ce qui importe.

Tu aurais mieux fait de m’écouter, les rares fois où tu acceptais qu’on se voie, lors de nos séances de pêche au bord des lacs gelés de Dun Morogh.

La volonté ne fait pas tout. Il y a des gens qui sont destinés à briller. Tu n’en étais pas, et il aurait mieux fallu te faire une raison. Te faire relever dans ce corps sans âme, à la volonté contrôlée par un autre, était la dernière des choses à faire. Celle de trop, sans doute.

J’ai l’esprit plus serein à présent. Le soleil se couche. Je suis restée trop longtemps à rêvasser, et un mince courant d’air agite les maigres buissons environnants, me rappelant à la réalité.

Finalement, je crois que je n’avais juste pas réussi à faire mon deuil. C’est idiot. Cela remonte à seulement une décennie. Pourtant, le souvenir s’efface déjà. Je revois quelques images d’un modeste fragment de sentinelle.

https://drive.google.com/open?id=1QAaLQgDwXi7YhmYBLwzB3X_ssROjrdoq

Un éclat, subitement. Un corps retourné à la mer. L’image est floue, sans couleur.
Déjà, elle est oubliée.
Peu importe. Nous étions sans importance.




Ce dernier chapitre clôture le cycle de ces petits récits de souvenirs (plus ou moins enjolivés).

Une compilation de ces textes est disponible en version PDF, pour ceux qui chercheraient un peu de lecture, au cours d’un trajet de bus ou dans une salle d’attente. :wink:

https://drive.google.com/file/d/1nCS7zZCcUBxtbdknCMi9Gl3_ILdqohDK/view

Pour la suite, ce sera désormais en jeu. À bientôt, sur Sulfuron ou ailleurs !

3 mentions « J’aime »

Allez, zou, un petit up sans vergogne.
Faut pas que ce genre de truc tombe dans les abîmes de l’oubli :stuck_out_tongue_winking_eye:

Salut.quel plaisir de te lire.est-ce-que tu joues a wow classic?si oui.et tu satisfait?