Un jour, un lieu, un souvenir...

Tu redonnes vie a des endroits oubliés de tous, sans doute même de leur créateurs… Des cranes Orcs, des caisses de la horde… peut-être des colons de la horde ont-ils vécu ici et, morts de faim, se sont entretués…

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Les toilettes de Crasseboue

C’est quand même un comble… Vous trouvez des gogues au milieu de nulle part, et il faut qu’elles soient occupées !

Le site de fouilles de Crasseboue, comme la plupart des excavations anciennement sous protectorat de Forgefer, dans la gorge des Vents brûlants, a été envahi par les Sombrefer. Ces saletés, quand je dis qu’elles se propagent comme la mauvaise herbe… À la base, je voulais juste récolter quelques pierres solides pour mes bidouillages. Et, de fil en aiguille, je me suis retrouvée à trancher dans le lard des gardes et des golems de guerre locaux.

https://drive.google.com/open?id=14m_2Gc_tmyzQkiiE_B-MeTKGdETaE61P

Suite à une envie pressante, j’avise un cabanon en bois, dans les hauteurs. L’endroit approprié pour ma petite affaire. Je grimpe le versant et m’approche. Je fais jouer le loquet. Rien. Étrange, la porte est verrouillée simultanément du dedans et du dehors. J’insiste en tournant la poignée dans tous les sens, forçant sur les charnières.

Une voix plaintive s’élève de l’intérieur. Un individu se lamente sur sa situation. L’aventurier malheureux s’est retranché ici, mais les Sombrefer, qui l’ont suivi, ont trouvé amusant de l’enfermer à double tour avant de partir. La blague est de si bon goût que j’aurais presque envie de l’abandonner à son sort.

Je me résigne cependant à l’aider. Une petite vengeance sur les géologues locaux est totalement dans mes cordes.

Je nettoie rapidement le camp de tous ces lanceurs de boules de feux d’opérette. Mais je suis loin d’avoir atteint mon quota. Je vais attendre un peu qu’il en vienne d’autres. Dans un premier temps, j’envisage d’empiler proprement les cadavres, tel un fustier à l’œuvre, pour faciliter le décompte de mon commanditaire. Mais ces nains, une fois refroidis, sont des masses impossibles à déplacer. Je renonce après une vingtaine de minutes d’efforts et de transpiration vaine. L’idéal serait de les attirer sur le tas avant de les abattre. Mais ils ne se laissent évidemment pas manipuler avec tant de facilité.

Dans la fosse du site de fouilles, je tombe sur un moribond. Dorius Soignepierre a été salement amoché par les Sombrefer. Hémorragie interne, nombreuses contusions, pertes de connaissance. Il doit être escorté de toute urgence auprès d’un soigneur. Je ne veux prendre aucun risque, et lui promets de revenir après avoir convenablement purgé les environs de la vermine. Si une patrouille nous tombe dessus à l’improviste, il ne tiendra pas le coup.

https://drive.google.com/open?id=134iesMB-OKw9Kw3cMs_xuPp9eKLiZZL5

Aussitôt remontée sur la terrasse, un groupe de gardes m’assaille justement. J’esquive au mieux, encaisse douloureusement quelques coups d’épée, et achève le dernier combattant. De nouveaux géologues ont rejoint le campement. Je me faufile discrètement dans leur dos pour terminer ma mission première. Ils croustillent sous mes dagues. C’est un vrai bonheur. Seuls leurs golems protecteurs me donnent un peu de fil à retordre. Je recompte les dépouilles. Tous les doigts dressés. J’ai les huit !

Je file rejoindre le captif enfermé dans les toilettes, et lui annonce sa bonne fortune. Il me demande aussi une pile d’étoffe de soie. Je me demande pourquoi, mais je ne vais pas me faire prier. J’en ai récolté bien assez sur mes victimes. Je peux partager un peu, pour une fois.

Je glisse les pans de tissu sous la porte. En échange, il glisse un épais volume vers l’extérieur. Je m’en saisis en écoutant ses explications.

https://drive.google.com/open?id=1C6f4xwc1arlHVsQE4jNISxjCwPuqzim9

Sa visite dans le coin n’était pas motivée par une passion pour les régions étouffantes. Il est venu récolter des pattes cristallines solides pour un de ses amis, résidant à Gadgetzan. Ce grand livre de Tanaris liste les composants dont Froisse Bonnacier a besoin pour un travail de forge. Je feuillette les pages en diagonale… Il va me falloir partir assez loin !

Je relève le défi : après la gorge des Vents brûlants, direction le marais des Chagrins, puis Theramore.

Je dévale la montagne en courant. Je connais un coin où niche une colonie entière d’araignées verrières. Elles éclatent en morceaux dans un bruit cristallin, quand on cogne dedans. Promptes, mais fragiles. La collecte sera rapide.

Pour ce qui est du murloc voleur et du zeppelin écrasé, je les trouverai bien, en enquêtant sur place. Une visite dans des régions humides me changera agréablement, après les fumées étouffantes du Chaudron. L’air ambiant me calfate désagréablement les poumons.

Avec tout ça, j’en ai même oublié mon envie pressante.

Et… Bon sang ! Dorius ! Je me mords les lèvres. Il n’a certainement pas tenu le coup. J’espère que d’autres aventuriers sont passés par là et ont pu le conduire en lieu sûr. Son empressement malgré ses graves blessures, son regard affolé : il avait des informations importantes à confier à quelqu’un, j’en suis sûre.

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L’île de l’effroi (1)

Le chef naga est trop bien défendu. Je peux assommer un garde-serpent, et encaisser quelques sorts d’une ensorceleuse, mais trois à la fois, je ne tiendrai pas. Je renonce.

https://drive.google.com/open?id=1_jY7_xS0HiFURui3SaNdQZEqlZIuynHb

Latronicus ne va pas être ravi de mon échec. J’ai peut-être fait le plein de perles et fait le vide dans leurs rangs, mais les Hainecrête sont trop puissants pour moi. Enfin, trop puissants quand ils sont plusieurs.

Shandris Pennelune, sur l’île de Sardor, m’a fait enquêter dans les ruines de Solarsal. L’invasion des nagas n’a rien d’anodin, et menace le bastion elfique. Latronicus Lancelune est chargé de la défense des lieux, et a eu vent que les troupes reptiliennes étaient dirigées par un individu haut placé dans la hiérarchie Hainecrête. Un individu de sang royal, ou quelque chose du genre. Il est à la recherche d’un objet particulier en ces lieux, et il pourrait bien l’avoir trouvé. Le seigneur Shalzaru a pris pied sur l’île de l’effroi, plus au sud, dont le sous-sol est creusé de grottes labyrinthiques. Un endroit où ils se déploient sans opposition, et duquel ils pourront bientôt lancer un assaut en force sur tout le territoire. Ce qui est inadmissible.

Inadmissible pour les Sentinelles.

Dans le fond, moi, ça m’arrange aussi de faire le ménage. La peau écailleuse de ces nagas est souvent couverte de palourdes à large bouche, qui recèlent parfois des perles noires ou iridescentes, dont j’ai peu d’utilité en ingénierie, mais qui s’arrachent à prix d’or auprès de mes clients artisans. Alors tant pis pour mon aversion. Je veux bien mouiller la chemise dans ces eaux froides et mal fréquentées.

L’île de l’effroi présente un profil peu avenant, à l’horizon. Ce n’est pas la première fois que je viens dans la région. Mais je ne l’ai encore jamais accostée. On raconte des histoires atroces sur cet endroit. Certainement des balivernes colportées par des ivrognes pour effrayer les rustaudes. De hautes montagnes ceinturent l’île. J’ignore s’il y a un passage. Je ferai certainement quelques tentatives.

Plus tard…

Après avoir semé la terreur dans les galeries humides, il m’est finalement impossible de trancher la tête pensante de cette clique sifflante. Je ressors du complexe souterrain, un peu dépitée. Je fais trop peu attention, pensant avoir fait le vide dans les rangs des créatures locales. Mais il y a du boucan sur la plage.

Je m’approche, trop confiante, n’ayant pas le réflexe de me cacher. Un gigantesque tauren à la tenue ridicule charge les serpents avec vigueur, tranchant joyeusement, par grandes volées circulaires, d’une hache à deux mains plus grande que moi.

Le temps que je réalise la situation dangereuse dans laquelle je me suis fourrée, l’ennemi m’a repérée et me fait face. Zut !

Je sors précipitamment mes dagues de leurs fourreaux, et m’accroupis, prête à bondir. Face à cette tonne de gras pleine d’inertie, le seul moyen de m’en sortir sera la rapidité des mouvements.

Mais le gros tas s’accoude à sa hache, tranchant à terre, grignote paisiblement un morceau, puis me sourit de toutes ses dents. Je flaire un piège… Je reste sur place.

Non, il continue de sourire bêtement. Il agite un peu les mains, éructe quelques mots, et s’écroule de rire. Il se moque de moi, ou je rêve ? Balançant nonchalamment sa hache d’une main à l’autre, il fait quelques foulées dans ma direction, se courbant jusqu’à avoir le mufle à ma hauteur, puis repart en grands éclats sonores.

Et voilà, je suis tombée sur l’idiot du village. À tout les coups, le camp Mojache a tenté de le perdre en l’envoyant prendre un bain.

À défaut d’y laisser ma peau, je tente le tout pour le tout. Dans cette région où je n’ai aucune chance de trouver de l’aide, je pointe un doigt en direction de l’entrée de l’antre de Shalzaru, et me tourne vers lui en nous imitant en train de marcher côte-à-côte. Il me regarde d’un air effroyablement vide, puis semble comprendre, et frappe dans ses mains, l’air ravi. Il semble emballé par l’idée de faire équipe contre les nagas. Brave ruminant, va…

https://drive.google.com/open?id=1s2qDh_PJW-fxTOr5aZqowEeaHJb6c7pv

Je retourne prestement dans les couloirs, suivie de près par le bovin armé, qui fonce fièrement dans le moindre obstacle. Je songe à réviser mon jugement sur les taureaux. Dresser une de ces bestioles comme animal de compagnie serait une idée à tenter, pour les combats au corps-à-corps.
M’infiltrant par derrière je surine et achève les victimes avant qu’elles ne songent à s’enfuir.

Inutile de préciser que le seigneur du clan ne fait pas long feu, malgré son trident et les sorts de ses acolytes d’escorte.

Sur le cadavre, je ramasse une petite pierre irradiant une curieuse lumière rose. Cette étrange relique ne semble pas de facture naga. J’ai comme une sorte de nausée en la fixant attentivement du regard. C’est certainement le truc que les elfes de Pennelune évoquaient. Je l’emballe dans une chute de tissu de soie, avant de la fourrer au fond de mon sac à dos.

Il faut que je leur rapporte ça sans tarder…

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L’île de l’effroi (2)

Pendant ce temps, Crétin Premier saute tout autour des dépouilles, en riant à tue-tête. Il ne doit pas être facile à vivre tous les jours, celui-là. Lorsqu’il retombe après chaque bond, l’écho du tremblement dans la caverne semble se propager sur des distances incroyables. Il va nous rameuter toute la troupe, cet ahuri !

Évidemment, ça ne rate pas. Tandis que j’essaie de ramener la masse bondissante à un peu de raison, un garde-serpent patrouilleur nous tombe dessus.

Deux coups de hache suffisent à faire comprendre au naga qu’il n’aura pas le dessus. Il tente de s’enfuir. J’ajuste un carreau d’arbalète, mais je maîtrise encore mal ce modèle, et je rate ma cible. Elle plonge dans le bassin, suivie du pataud poilu qui disparaît sous la surface.

Je soupire, et je suis le mouvement.

Surprise ! À droite du monticule du chef, au fond de l’eau, un tunnel s’enfonce dans les profondeurs. La victime connaît les lieux mieux que nous, et a tenté l’esbroufe. Mais l’abruti de Mulgore, malgré son poids, a réussi à l’atteindre et lui faire exhaler le dernier soupir.

Je ne vais pas rester longtemps en apnée, et décide d’aller voir rapidement où mène ce passage. L’autre me suit sans hésiter.

Nous émergeons quelques brasses plus loin, dans un recoin étonnamment préservé.

https://drive.google.com/open?id=1CovjTTuO1WxYcx4AObjFxUSL9FSpz_l0

Un temple usé, d’un âge plus que vénérable, dresse encore ses colonnes sous terre. J’ignore à quelles fins il a été érigé ici. Les envahisseurs nagas ont certainement une idée sur la question, mais ils ne m’en diront rien.

Un culte secret, caché si loin sous terre, rattrapé par l’oubli du temps, n’a pas laissé beaucoup de traces. Je repense à l’objet étrange au fond de mon sac, mais préfère ne pas me perdre en conjectures. Je n’ai pas assez de connaissances en la matière.

L’absence de trésor me déçoit. J’essaie désespérément de faire comprendre par signes à l’imbécile heureux ce qu’il faut chercher. Normalement, au fond d’un endroit dangereux et reculé, il y a – toujours – un coffre rempli de richesses. C’est systématique. Mais nous avons beau retourner le moindre petit caillou, sonder les parois, aucun résultat. Tant pis. Les Hainecrête se sont certainement déjà emparés de ce qui avait de la valeur.

Ça n’a pas l’air de désoler beaucoup le tauren ahuri, qui tape les roches du plat de la paume et ricane à gorge déployée. Il n’a probablement rien compris de ce que je lui ai mimé.

Subitement, il tend l’oreille, et reste immobile quelques instants. Je n’entends rien, mais il semble capter comme un appel pressant. Il range sa hache, me salue prestement d’un grand signe de la main, arborant toujours un sourire courant d’une oreille à l’autre, puis plonge précipitamment vers le chemin du retour.

J’ai à peine le temps de lui retourner une grimace figée qu’il est déjà hors de vue. Je ne sais pas quelle mouche l’a piqué, mais je suis bonne pour rentrer seule.

En quittant les profondeurs, je me dis qu’il est temps d’explorer la surface de cette fichue île. Sur la côte orientale, je finis par trouver une gorge étroite menant à l’intérieur des terres. Quelques flambeaux balisent le passage.

L’intérieur de l’île est un gigantesque cirque coupé de la civilisation. La végétation est luxuriante. La moindre fougère cacherait deux gnomes obèses.

https://drive.google.com/open?id=1h_-pELDfSyrOkhuWA-166WuNEhcHjLI0

La faune est peu diversifiée, mais terriblement hostile. Des chimères chimaerok se sont reproduites, et ont sans doute bouffé tous les autres représentants du règne animal. Alors que la restriction de la surface habitable réduit généralement la taille d’une espèce endémique, ces créatures sont d’une envergure considérable. La plus petite d’entre-elles doit bien faire huit foulées de large.

Contournant un gigantesque tronc, je trébuche sur une racine recouverte de mousse. Le bruit alerte une chimère albinos aux veines striées de bleu. Le temps de me relever, l’une des têtes de la chimaerok m’inflige une décharge de foudre qui m’étourdit. La douleur me fait lâcher mes dagues, à la limite de la perte de conscience.

https://drive.google.com/open?id=1sfBrpFqA67Bt2AsECrx6psv8DEE3gOsZ

Je ne suis pas de taille. La fuite est la seule issue. Je cours à perdre haleine, ignorant les congénères de mon assaillante, qui m’attaquent au passage. Un crachat éclabousse le dos de ma veste, qui se met à fondre. Le venin corrosif atteint ma peau. La douleur est innommable.

Une chimère massive bloque l’entrée. Je continue ma course vers le sud, où j’ai la chance de trouver une autre issue, donnant sur la même plage.

La peur et la colère me font en partie ignorer la douleur. Je me soigne tant bien que mal. Marmonnant violemment contre ces bestioles. Un jour, je reviendrai, mieux préparée et avec des amis, et je tailladerai ces saloperies en pièces. J’en ferai des côtelettes. Oui, des côtelettes !

Il est temps de retourner sur l’île de Sardor. Assez d’émotions pour aujourd’hui. Je file sa relique mystérieuse à Latronicus, et j’irai faire un somme à l’auberge. Je suis épuisée. J’ai rarement visité une île portant si bien son nom.

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Les bouillonnements de Sar’theris

Encore et toujours des nagas…

À croire que cette espèce ne cessera jamais d’envahir mes plages favorites. Désolace ne devrait pourtant pas être très à leur goût : plaines arides et poussiéreuses, soleil voilé en permanence, plantes rachitiques, squelettes de kodos pour seules cathédrales.

Je dois reconnaître qu’ils ont de meilleures raisons d’occuper cet endroit plutôt qu’un autre. Le premier venu ayant plongé au large de la côte aura reconnu des ruines de monuments kaldorei antiques, aux frontons recouverts de coraux et de coquillages. Des bancs de poissons nonchalants frayent entre les piliers de guingois, ignorant superbement les quelques Ondulames qui défendent les hauts fonds.

https://drive.google.com/open?id=12N9TuY5BYmjiUSQnukD5aWjMyUP1zyyL

J’étais venue en repos, cette fois. Pas question d’aller vandaliser la statue d’Azshara sur l’île de Ranazjar, ni de rechercher les affaires perdues de Karnitol. Pas envie d’escorter ces casse-cous de Gizelton, ni de capturer des ectoplasmes entre les squelettes démesurés de la vallée des Ossements. Pas de vaine séance d’escalade pour tenter d’atteindre le plateau dominant Tethris Aran, débouchant seulement sur des ongles arrachés et une chemise déchirée et poisseuse de transpiration.

Juste une bonne séance de pêche à l’air marin, dans un endroit où personne ne me dérangera.

Enfin, ça, c’était le plan. Un long voyage pour quelques jours de repos… et me rendre compte que j’ai oublié mes attracteurs de poisson aquadynamiques.

J’enrage. Pas moyen d’obtenir la moindre prise correcte sans ça, par ici. Et pas moyen d’en fabriquer de toutes pièces avec les moyens du bord. Ça m’apprendra à ne pas faire de liste et de trop compter sur ma mémoire.

Il ne me reste que le farniente, dans l’herbe haute de la grève de Sar’theris, une oreille toujours à l’affût du grondement caractéristique d’un lézard-tonnerre déchaîné approchant trop près. Et quelques brasses à marée basse, pour la forme, le soir venu, dans une mer réchauffée par les éclats diurnes.

https://drive.google.com/open?id=1He5gce5cNzIH3YYJKjnhiw-CFeSlM4yv

Bon, évidemment, lorsqu’une sorcière Ondulame me repère de loin et commence à gigoter des mimines pour me lancer une saloperie, je me fais un plaisir d’aller la déchiqueter à coup de couteau à huître. Faut pas me chercher quand je suis de mauvais poil, et en petite tenue qui plus est. Pour un peu, je ferais presque du bruit exprès, pour que les nagas me repèrent, et que je dispose d’une bonne raison d’aller éclater leurs tronches de serpents mal fignolés.

Cette tribu semble trop sûre de sa puissance, et la plupart de ses membres nagent en solitaire. S’ils restent assez concentrés aux abords des îles, sur cette plage, en revanche, ils sont trop éloignés les uns des autres pour lancer l’alerte. Je n’ai donc pas de difficulté à les rattraper pour les finir, malgré leurs talents de fuyards.

L’un d’eux file en ce moment doit au nord, un couteau coincé entre deux nageoires dorsales. Je le rejoins au fond de l’eau, où il expire dans un dernier soubresaut.

Je récupère ma lame, avisant un autre individu, un peu isolé, un peu plus encore vers le nord. Celui-ci n’a pas les écailles azurites de ses collègues, mais arbore une majestueuse crête sinople. Sa couleur particulière en a-t-elle fait un membre à part, plus puissant, mais rejeté par les siens ? Cet ondulame maudit ne verra pas le coup venir. Je nage aussi lentement que possible, m’approchant de dos pour garantir l’effet de surprise.

J’ai juste le temps de ramasser un lourd maillet lesté sur son cadavre, avant de remonter prendre ma respiration à la surface. Il est temps de retourner sur la berge avec mon butin.

« blop ! »

Comment ça, « blop » ?

Quelques longueurs toujours plus au nord, entre les récifs côtiers, un son de bulles crève la quiétude de la mer calme. Je m’approche.

« Blop, blop ! »

Il doit y avoir une créature en-dessous. Je prends une grande inspiration et je plonge, arme au poing, prête à toute éventualité. Sur un parterre vaseux, parsemé de rares algues secouées par le courant, des bouillonnements éclatent par intermittence.

https://drive.google.com/open?id=1xFXloaTET-YjCMuB5SMVaEu_8C3rl4M4

Ces bulles de boue, qui se forment à intervalles réguliers, ne ressemblent à rien que je connaisse. Cela n’a pas l’air d’une fissure d’air venant des tréfonds. L’eau n’est pas particulièrement chaude, donc cela ne doit pas non plus résulter de la pression d’une poche de lave. Ce n’est pas non plus la respiration d’un antique monstre abyssal endormi sous le sable.

J’ai vu beaucoup de choses dans les profondeurs. Mais encore rien qui ressemble à ceci. Encore un mystère non résolu qui s’ajoute à ma liste. Je doute de trouver une réponse rationnelle à celui-ci un jour…

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L’or de Cuergo

J’en suis convaincue : les pirates ne pensent qu’à l’or et à l’alcool. Et ils confondent souvent les deux.

J’ai découvert la crique des Gréements tout à fait par hasard. Longeant les massifs montagneux de Tanaris, à l’affût de ressources en fer, j’esquive les plaines parsemées de Bats-le-désert et de Brûlepattes affamées. À l’approche de la plage des Déferlantes, je remarque un large monticule de roche rouge, comme une entrée de caverne, sur le versant septentrional des Grottes du temps.

https://drive.google.com/open?id=1UNGJtcg0VAEgdmhW2WOPRySGrHYgijyq

J’entre. Un grand couloir naturel sinueux est éclairé par la lumière du jour… C’est un tunnel !

Il débouche sur une plage isolée. Un petit filon de thorium me saute aux yeux, à droite. C’est mon premier. Je l’inspecte de près, mais ne sais comment m’y prendre. Avant de tenter la-méthode-qui-marche-toujours, en d’autres termes, l’explosif, je jette un œil aux environs. La détonation attirera-t-elle l’attention de présences malveillantes ?

À moins d’une demi-lieue, des tentes de toile de lin écru, orientées vers le rivage, se dressent sur une butte de sable. Des pirates !

J’en savais la région infestée. Mais je ne pensais pas en croiser. La menace flibustière pèse lourd sur les côtes voisines. L’activité portuaire à Gentepression s’est effondrée, au désespoir des gobelins de Gadgetzan. Deux navires lourdement armés, reconnaissables à leurs voiles noires et rouges, les narguent, au large, à portée de canon de la principale voie d’accès maritime de la cité du désert.

Ce repaire, bien caché, doit permettre aux bandits des mers de se réapprovisionner en eau douce et de réparer leurs avaries. Longeant la rive à couvert, je progresse vers une enceinte en troncs de palmiers écorcés.

Il y a là des humains, des gobelins, quelques nains à la peau sombre, et même deux gnolls ! Un ramassis disparate de larrons de la pire espèce. Comment ces loques peuvent-elles sérieusement menacer une troupe régulière ? J’avise plusieurs bouteilles vides, jetées contre une caisse de ravitaillement défoncée. L’alcool, bien sûr !

L’alcool, qui laisse libre court aux pires pulsions : des petites goulées qui donnent du courage, aux grandes gorgées qui inhibent l’estimation de la force ennemie. Si cette ténacité mène généralement à la mort, elle effraye cependant les adversaires, qui se laissent souvent impressionner par une telle détermination, confondue absurdement avec de la confiance.

https://drive.google.com/open?id=1pysN3DVey7SruXonS4Pt6sWdHf5HNphf

Un portefaix, masqué par une pile de troncs, me surprend en pleine intrusion. Je plonge une lame dans sa gorge avant qu’il ne donne l’alerte, et fouille son cadavre sans regret. Ses maigres possessions se résument à deux pièces d’argent et un petit coffre de pirate. Celui-ci contient de vieux souvenirs sans valeur, et un bout de carte.

Sur le fragment de papier, salement froissé et tâché, je distingue les contours de côtes stylisés, et certains noms en partie effacés. Le plan est déchiré. Il en manque deux gros morceaux. Impossible de reconnaître précisément l’endroit, sans les éléments manquants.

Malgré plusieurs heures à traquer les individus isolés, je peine à récolter les indices qui me font défaut. Un bretteur trop téméraire finit par me fournir un fragment, qui s’accorde à la partie supérieure de mon échantillon.

Deux jours plus tard, seulement, j’acquiers à bon prix, à l’hôtel des ventes de Gadgetzan, un rouleau de parchemin froissé ressemblant étrangement à mes trouvailles. J’assemble les trois. Les raccords correspondent !

Les explications rédigées sur le document recomposé sont désormais beaucoup plus claires, et je peux identifier le site désigné par un dénommé Cuergo.

L’auteur a enterré son trésor sur la plage du Bout-du-monde, très au sud. L’emplacement est balisé par un drapeau et des ossements. Ce sera un jeu d’enfant. À moi la richesse facile !

Après avoir nagé des heures, affronté des tortues trop susceptibles, et fouillé longuement les débris d’un gyrocoptère écrasé, j’atteins finalement l’endroit. Loin au large, je distingue les contours d’un archipel oublié. Ce sera pour une autre fois.

https://drive.google.com/open?id=17yb7StoS4iepUHrS7jxsl5T1zXyLmwz6

Je sors une petite pelle rétractable, et me lance dans la dernière excavation.

C’est un piège ! Un vulgaire piège !

Une troupe de chasseurs de trésor fond sur moi. Je tente de fuir, parvenant à tuer deux des boucaniers dans la débâcle. Les fourbes survivants finissent par abandonner la poursuite. Je récupère mon souffle aussi prestement que possible, et me soigne, avant de retourner sur place. Hors de question de leur laisser ce coffre, après tant d’efforts.

Quelques manœuvres habiles, donc sournoises, me permettent d’achever les trois derniers. Je ramasse une petite clé rouge sur l’un d’eux. Elle s’adapte parfaitement à la serrure du trésor, qui s’ouvre après un petit déclic agréable.

Ça y est, je devine l’or, les bijoux, les pierres précieuses, la… bouteille ?

Qu’est-ce que c’est que cette arnaque ?

En plus, son alcool n’est même pas buvable. À travers le flacon translucide, je remarque nettement un gros ver mort, reposant mollement au fond du culot. Berk !

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Je me lis une petite anecdote par jour et je peux te dire que ça arrange pas mon impatience pour classic.

Continue, c’est vraiment super.

Bonjour Cricketto !
Merci pour tes encouragements, et désolé pour la réponse tardive (oui, je sors de ma grotte après 3 mois, et alors ?). Tu dois avoir déjà épuisé ton quota de patience, et je ne peux malheureusement plus garantir mon rythme d’écriture.

J’ai plusieurs chapitres sur le feu, mais trop peu de temps pour m’y atteler convenablement (en raison d’autres priorités IRL). Quoi qu’il en soit, je prendrai le temps qu’en publier quelques uns, jusqu’à la sortie de Classic.

Pour me faire pardonner, en voici un petit, très nostalgique…


Linken

On m’avait vendu le cratère d’Un’Goro comme un pays de cocagne. J’ai rarement été aussi déçue.

Dans ses lettres, Ravelle m’en parlait toujours avec une fébrilité confinant à l’hystérie. Nos amis communs m’avaient déjà fait part de son attitude intenable lorsqu’elle s’y rendait. Incapable de rester plus de deux minutes sur son bélier, elle sautait de selle pour se précipiter vers une jeune pousse de Pétale-de-sang, avant de bifurquer, l’instant d’après, vers un cristal de puissance à ramasser non loin. Lorsque ses comparses se désespéraient de la voir enfourcher sa monture, la voilà qui fonçait droit vers un tas de poussière d’Un’Goro pour en récolter l’humus, si ce n’était pas le chatoiement d’un pied de feuillerêve ou d’aveuglette qui attirait son attention. Impossible d’avancer rapidement en sa compagnie. Ce n’était que déviation effrénée d’une ressource à une autre, sans le moindre soucis du danger représenté par les dimeurtrodons et autres pterreurdactyles locaux.
Lorsque ses bagages étaient pleins à craquer, plutôt que d’en tirer de sages conclusions, elle poussait le vice jusqu’à demander aux membres de son groupe de transporter une partie de ses affaires, afin de pouvoir en récolter encore un peu plus !

Par conséquent, j’ai fini par m’y rendre à mon tour, tardivement, m’attendant à n’avoir qu’à me baisser pour empoigner ce qui ferait ma fortune prochaine. Quelle erreur…

Quittant les sables brûlants de Tanaris, je descend le chemin sinueux et raide menant à ma destination. La température descend à peine, mais l’humidité devient vite insupportable. Des nuées de moustiques se reproduisent à foison. Au fond de ce cirque, l’humidité est omniprésente, sous forme de lagunes boueuses, vestiges des dernières pluies torrentielles.

Après les moustiques, de féroces ravasaures esquissent ma deuxième mauvaise expérience locale.

https://drive.google.com/open?id=18KlD1cCgrf2Tgbj_9FXjjcpNZaziCI0B

Louchant avidement sur leurs nids, j’envisage sans retard une magnifique provision d’œufs. Hélas, ces foutus reptiles, aussi stupides qu’ils paraissent, ne sont pas moins dotés d’un odorat très affiné, et m’agressent avant même d’être à portée de larcin.

Dans ma fuite, des saletés de petits serpents de toute sorte manquent de me faire trébucher. Je parviens à peine à semer mes poursuivants au bord d’une mare stagnante.

Par temps de pluie, cette fondrière doit être littéralement immergée sous plusieurs coudées. Le sol détrempé a cependant absorbé une partie des intempéries, et des débris variés refont surface.

De l’autre côté de ce marigot d’occasion, une épave de barque très endommagée est entourée de caisses de fournitures. Je contourne l’étendue d’eau et fouille la coque en décomposition.

https://drive.google.com/open?id=1_ywGlk3QDY-uxXXHs9oWLagFegmhBO5w

Il n’y a rien de très reluisant dans le radeau. Mais je parviens à remonter du fond de l’étang un sac imprégné de vase. Le butin est plutôt maigre et énigmatique. Une grande boussole dont l’aiguille semble démagnétisée, une photographie ternie et délavée, soulevant en moi un étrange sentiment de nostalgie, un vieux masque de bois peint, une carte indéchiffrable, une petite clé à tête de lion… Le propriétaire me récompensera peut-être pour avoir retrouvé ses babioles. S’il est encore en vie !

On m’a vivement recommandé le havre de tranquillité relative du refuge des Marshal. En chemin, je ne croise cependant presque pas d’âme qui vive, digne d’une conversation sympathique. Un tauren solitaire perché sur son rocher, un dresseur de raptors blancs, dédaigneux et versatile, une vieille trollesse accompagnée d’un louveteau de compagnie, un gobelin déshydraté qui s’évanouit à tout bout de champ. Pas vraiment de quoi meubler une soirée de débat sur la résistance des gyrochronatomes ou le point de fusion du vrai-argent.

Arrivée au refuge, je finis par dénicher un petit bonhomme au regard terne, caché au creux d’une souche. Coiffé d’un capuchon vert sapin, et d’une veste élimée jusqu’à la trame, il semble avoir beaucoup voyagé. Autour de son cou, suspendu à un cordon de cuir, pend un vieil ocarina en terre cuite. S’agit-il d’un ménestrel égaré ?

https://drive.google.com/open?id=1KBDWgHr3VsVVs2_tnJM8aIpsNP2ur8Fh

Le pauvre garçon est visiblement déboussolé. Il a été recueilli ici après avoir mystérieusement perdu la mémoire. J’ai beau déballer sa menue quincaillerie sous ses yeux, quelques vagues souvenirs sont insuffisants à lui rappeler son identité. Si j’en juge par son écu d’acier usé, arborant un aigle de gueules surmonté d’un assemblage de triangles dorés, il a certainement survécu à plus d’un combat épique.

Une seule chose lui semble sûre. Si je présente son épée à une dénommée Donova Antreneige, au Berceau-de-l’Hiver, elle saura certainement l’aider.

Ce gars-là ne garantira certainement pas ma richesse. Mais il me fournit au moins une excellente excuse pour quitter cette région étouffante. Il y a vraiment des moments où j’en viendrais presque à préférer la neige…

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Les sources du bois de la Pénombre

Le bois de la Pénombre est un endroit qui m’a toujours à la fois effrayé et fasciné. J’ai beau me répéter que cette région, désolée et envahie par une mauvaise aura, n’apporte que le malheur à ceux qui la traversent, mes pas finissent immanquablement par m’y ramener, un jour ou l’autre.

J’ai la sensation d’y être constamment épiée, comme si des yeux m’observaient, depuis les buissons longeant les sentiers envahis de mauvaises herbes et que personne n’entretient plus depuis des lustres.

Sur la route menant des Carmines à Sombre-Comté, j’ai pris l’habitude de faire une halte auprès de Kzixx. Ce marchand ambulant gobelin est plus amical que la plupart de ses congénères, mais son nom reste définitivement imprononçable à mon goût. Il me propose régulièrement des accessoires magiques, que je trouve toujours le moyen de refourguer en ville avec un confortable bénéfice. Ça ne rapporte pas autant que les charmes de chance que je vole à ces abrutis d’ogres Brisepoing, qui se terrent dans leur taudis crasseux au sud-ouest, mais le danger est moindre. Il m’a même dégotté un schéma d’ingénierie parmi mes préférés, même si cela reste de l’ingénierie gobeline, donc peu fiable.

https://drive.google.com/open?id=1XbWzp7AnF6BmFBxnNYrY9j8IAszlN0E5

En longeant la Rive sombre, ceinturant la région au nord, en quête d’une éventuelle épave de barque à piller, je remarque un affluent grimpant vers les montagnes. Une haute et fine cascade me fait rapidement face. Je vais devoir trouver un chemin détourné pour accéder aux sources.

La recherche d’une passe ne se fait pas sans difficulté. J’ai beau escalader les rochers autour du manoir de Mantebrume, dont j’ai assassiné l’amoureux éperdu il y a bien longtemps, aucune voie ne semble praticable.

Plus au sud, je finis par atteindre la tour de garde abandonnée du Repaire des Mendiants. Des apothicaires réprouvés y ont élu domicile. Je ne manque pas de leur planter une dague dans le dos. Peu m’importe qu’ils ne se soient pas montrés hostiles. Je me fiche bien de la mauvaise réputation que m’apportera le meurtre de ces insanités animées, que certains s’évertuent à considérer comme des civils. Les morts-vivants ne sont pas les bienvenus sur ces terres, qu’ils soient dotés d’un semblant de conscience ou pas.

Derrière la tour, de grandes grilles dégondées, agressées par la rouille et les ronces, s’apprêtent à s’effondrer totalement. Je n’étais jamais venue jusqu’ici. Une voie sinueuse s’enfonce dans les montagnes. Un bruit lointain d’eau courante m’indique que je touche au but. J’atteins une petite clairière aux parois escarpées, ou un petit bassin marque le début d’une future grande rivière. L’endroit est calme, baigné d’une lueur moins démoralisante que dans le reste du bois, peut-être à cause de l’altitude. Un gisant de pierre naturellement fleuri marque la tombe d’un valeureux combattant, dont le nom a été effacé par l’érosion. Deux gigantesques sentinelles brunes encapuchonnées veillent sur son repos éternel. Je trouve ce cimetière à la fois triste et charmant.

https://drive.google.com/open?id=1-3f2PeYqJANsnLkUrT8TD-2PClJeAK6Q

Je pense que je reviendrai avec quelques amis. Le cadre est idéal pour une soirée de contes de la Sanssaint, où nous nous divertirons des aventures les plus effrayantes qui nous sont arrivées.

À quelques lieues d’ici, j’ai combattu une gigantesque arachnide rouge, couverte de mousse, tapie au fond d’une grotte, dont le croc empoisonné m’a fait office de dague pendant quelques années.

Plus loin, je me suis infiltrée au milieu de champs et de galeries souterraines infestées de worgens, sur les traces d’une faux magique venue d’un autre monde, permettant d’invoquer ces créatures féroces et cruelles… mais incontrôlables.

J’ai défendu Sombre-Comté contre l’attaque d’une abomination couturée, lancée sur la ville par un vieil ermite jaloux. L’enquête des Veilleurs ne leur a jamais révélé que j’avais aidé involontairement cet individu dans l’aboutissement de son méfait. Je déteste le souvenir d’avoir été dupée aussi facilement.

Je me souviens encore avoir accompli la vengeance d’un humain dépossédé de ses terres, abattu un puissant nécromancien réfugié au fin fond du cimetière de Colline-aux-Corbeaux, et échappé à maintes reprises à la mort, face à un colossal guerrier squelette à l’épée flamboyante rôdant entre les pierres tombales. J’ai même vu, de loin, un dragon corrompu, dans une grande clairière cachée au milieu des montagnes.

https://drive.google.com/open?id=1yJ6vzTOpzqsa624BAAZ0XTB9lCYmu864

Mais si je leur raconte tout ça, ils ne voudront jamais me croire, c’est sûr. Je pense que je les laisserai juste parler, pour une fois, en évoquant leurs banales histoires de citrouilles et de chauve-souris, en mâchonnant des caramels de Ruisselune et des barres de chocolat, gardant juste pour moi la satisfaction de les avoir conduit, le temps d’un soir, dans un endroit si chargé de charme romantique.

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La Perce des Serres

Je n’ai pas oublié Galahad, un beau gosse humain rencontré à Teldrassil, lorsqu’il évoquait les wyvernes ailes-fières, dont les nids, perchés sur des éperons rocheux entourant le lac de Mirkfallon, contiennent les meilleurs œufs des Serres-Rocheuses. Sans comparaison possible avec ceux des tisseuses des mousses, qui ont essaimé un peu partout au sud. J’y suis allé une couple de fois, depuis lors.

Je me souviens du petit sentier escarpé surplombant la retraite de Roche-Soleil, duquel je lançais des cailloux sur les toiles des tentes en contrebas, et du petit bosquet oublié au sommet de la montagne, semé de caisses de fournitures, traces d’un bivouac éphémère de la Horde.

Traverser Orneval, puis les Tarides, territoire hostile s’il en est, n’a jamais été une mince affaire, à mon goût. Mais une fois les Serres atteintes, l’endroit est à la fois calme, et bien balisé. J’en ai passé, des heures, à crocheter les cantines endommagées de la mine des Cisailles, médiocrement surveillées par les kobolds, ou à traquer les élémentaires du Val calciné.

Aujourd’hui, la Combe des Cisailles a bien changé. Le vallon est largement déboisé. Le fleuve Loup-noir charrie quantité d’immondices. La KapitalRisk y déverse ses rejets industriels sans soucis pour le pêcheur souhaitant taquiner le goujon. Par endroits, des nappes de naphte nauséabondes affleurent même la surface. Les gobelins exploitent le bois, la terre, et même le lac de la Combe. À quoi peut bien leur servir cette gigantesque roue drainant le flux de la cascade voisine ?

https://drive.google.com/open?id=1S-C03t1PeBitxxvEslcB7Vq18yr71yVu

J’ai connu cet endroit un peu plus verdoyant. Enfin, il me semble. Des souvenirs de rouille et de diamants remontent à ma mémoire. Je parcours du regard la terre sèche et ferreuse, que les rares intempéries, plus sûrement que des pluies acides, transforment en terrain argileux et stérile, où plus rien ne poussera désormais. Pour la rouille, je suis servie.

Un tel paysage me désole et fait bouillir ma colère. Quand il s’agit d’ingénierie, ils ne savent que faire exploser des trucs, sans la moindre finesse. Et leur conception de l’exploitation du territoire ne vaut guère mieux. Mais où sont passées toutes les fleurs ?

En remontant le cours du fleuve, je prends un plaisir sournois à planter une dague en argent dans le dos de chaque défricheur qui ne surveille pas convenablement ses arrières.

Les kobolds sont toujours là. Les cantines endommagées aussi. La mine des Cisailles est encore exploitée. Je m’infiltre discrètement. Je sais que je trouverai sans difficulté un filon d’argent ou deux. Les terrassiers ne semblent pas s’y intéresser.

Au fond d’une galerie, isolé, je repère un gobelin. Il fait sombre. Un fragment de roche se décroche sous mon pied. Le gobelin se retourne. Je m’apprête à attaquer, mais retiens tout juste mon geste.

https://drive.google.com/open?id=1OsbLKilI1_O7Or6b83FxXjwG4mRYtooQ

Piznik n’est pas agressif. Il se présente, et semble ravi de rencontrer quelqu’un d’hostile à la KapitalRisk, dont il prétend pourtant faire encore partie. Il me raconte une histoire qui m’intéresse bien peu : une vulgaire jalousie professionnelle et une vengeance. Il cherche à voler des échantillons de minerai local, pour le compte de ses anciens commanditaires, et m’invite à le protéger pendant sa récolte.

La paie est médiocre. J’accepte, évidemment, mais, camouflée parmi les ombres, je le laisse mourir sous les coups des patrouilles alertées par le bruit. Peu importe son allégeance, qu’ils s’entretuent entre nuisibles me convient tout autant. Je n’aurai qu’à fouiller les cadavres après leur empoignade.

Une fois le danger éloigné, je ressors de ce trou à rat. Face à la sortie, un flanc de montagne non encore déboisé, sert de refuge aux dernières rampantes chassées de la combe.

Je grimpe entre les derniers arbres du lieu. Dans un recoin à l’est, un tauren défoncé à la dorépine semble parler tout seul, baragouinant des énigmes. Je le réduis au silence d’un coup de dague bien ajusté. Fallait pas être là où je me promène, quand je suis de mauvaise humeur.

Un peu plus au nord, une grotte attire mon attention. Des lanternes sin’dorei éclairent l’intérieur. Comment les elfes sont-ils arrivés jusqu’ici ? Je m’engouffre dans ce qui semble plutôt, au second regard, être une galerie. L’endroit paraît convenablement entretenu. La température diminue à mesure de ma progression. Mais pas de trace de vie.

https://drive.google.com/open?id=10JlQM4hTX5aPXqWnNlW-eMeeqzcCBPOR

Un courant d’air ? Où cela mène-t-il ? La lumière change. Un soleil voilé filtre à travers le feuillage de… Huuuu… Je suis à Orneval ? J’ai passé des pu***ns d’années à me taper un contournement harassant, coûtant des jours de voyage, alors qu’il y avait un foutu souterrain entre ici et les Serres ?

Vite, un cerf, ou furbolg, un lapin… n’importe quoi à cogner, que je passe ma colère sur quelque chose de vivant qui ne va pas le rester longtemps !

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Je me souviens du sentiment de progression avec les premières épaulettes que j’ai loot. Des vieilles épau blanches lvl17 ou 18 mais j’étais trop content.

Un petit bump pour ce post qui le mérite, amateurs de belles lettres et de wow régalez vous :stuck_out_tongue:

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Bump mérité, je me réjouis à l’idée de lire en détails toutes ces histoires dans les jours à venir.

Bravo à toi Buchette !

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Merci pour les encouragements !
Après une période clairement surchargée, il me reste donc un petit mois pour rédiger ce que j’avais encore dans les cartons… Mais je préviens, il y aura un peu de tout et de rien…

“Un jour, un lieu, un souvenir…”
Laurent Delahousse, sortez de ce corps!

Les tombes dispersées

Heureusement que le roi-liche se contente des cadavres les plus frais. S’il pouvait relever la moindre dépouille enterrée depuis des éons, les royaumes de l’Est n’auraient pas fait long feu.

Chaque village a son cimetière. Chaque région, ses cryptes. Chaque champ de bataille passé, ses mausolées oubliés. Partout où j’ai voyagé, j’ai retrouvé une trace de ceux qui ne sont pas revenus. Autochtones massacrés, aventuriers téméraires, combattants perdus au champ d’honneur. Et beaucoup, beaucoup trop de tombes de soldats inconnus.

C’est une discussion que j’ai souvent eue, avec Ravelle, à l’époque où nous allions encore à la pêche ensemble. Je me souviens d’une petite île, à l’intersection du fleuve, entre la forêt d’Elwynn, la Marche de l’Ouest et le Bois de la Pénombre. Oh, l’endroit est sans prétention, mais plutôt agréable et serein, quand on connait les mauvaises fréquentations des trois régions avoisinantes, finalement ! Un lieu calme et reposant, à l’abri des combats, idéal pour taquiner le goujon.

https://drive.google.com/open?id=1sl7wlX2rzkc3RSsI3KkeBd5xBpA1uqsM

Ce n’est donc peut-être pas un hasard, si certains ont choisi de se faire inhumer ici. Proche des affaires du monde, mais loin des regards et des dangers…

Ravelle m’avait alors posé une colle : « pourquoi si peu d’épitaphes héroïques ? »

Je n’ai jamais rejoint les rangs réguliers, contrairement à elle. Impossible de m’astreindre à la discipline militaire. Elle avait une réponse assez logique, après tout ce qu’elle avait vu au front.

La plupart des combattants ne meurent pas de manière glorieuse. Le manque d’hygiène, les ravages de la vermine, l’absence de soins appropriés pour la moindre blessure bénigne, sont plus létaux qu’une charge d’orcs noirs chevauchant des worgs enragés. Pour un seul guerrier mourant le glaive au poing dans un corps-à-corps brutal, cinq succombent de plaies nécrosées, dix sont emportés par la dysenterie, la fièvre, le froid, la malnutrition, la peur ou la folie. Sans parler de ceux qui disparaissent au cours d’une débandade ou d’une désertion, perdus, errants, dont on retrouve le cadavre au petit matin, à demi dévoré par une bête sauvage, ou un poignard traître planté entre les omoplates.

Qu’écrirait-on sur leur tombe ? « Il a chié liquide sans discontinuer, jusqu’à son dernier souffle » ? Ou pourquoi pas « Il est parti vaillant, mais son ongle incarné a eu raison de sa fierté » ? Magnifiques gestes pour les bardes de Hurlevent. De quoi lever sans coup férir de nouvelles troupes fraîches de jeunes décérébrés, la tête remplie de rêves de gloire et de conquêtes hautement réalistes ! Pfeu !

Non, mieux vaut ne marquer que leurs noms. Quand – encore – quelqu’un s’en souvient.

C’est sûr, si vous vous appelez Uther, vous pouvez être tranquille. Vous aurez droit à la pierre blanche, aux massifs fleuris, et aux officiants veillant sur votre gisant à toute heure du jour et de la nuit, avec force bougies et encens parfumés.

https://drive.google.com/open?id=1p2LG4j4-VaiNnXNUVB-pEQoZU46p8DUW

Un atroce goût de bile me monte à la gorge. Au royaume des puissants, l’histoire s’écrit dans le marbre, et s’enjolive au besoin. Il te suffit d’une particule pour que des cohortes de pèlerins viennent pleurer devant ta statue. As-tu eu plus de mérite que ceux qui sont tombés, dix pieds derrière toi ?

Mais qu’est-ce qui me prend ? Après-tout, le temps se chargera d’éroder les gravures. D’autres ont aussi pensé laisser leur marque. Qu’en reste-t-il ?

À peine plus au sud, dans les contreforts de Hautebrande, surplombant le donjon de Fort-de-Durn, un autre a eu droit aux honneurs. Sans doute un fier combattant, lui aussi. Un défenseur au bouclier poli et à l’épée ornée de gemmes rouges. Ceux qui lui ont survécu ont dressé un monolithe à son souvenir, à l’ombre d’une petite colline. Mais les ronces ont envahi les grilles de sa dernière demeure. Et la vigilance des gardiens a fini par s’atténuer, laissant l’occasion aux charognards et aux pilleurs de tombes de venir perturber son sommeil éternel.

https://drive.google.com/open?id=10F0ABrmLKFyvtvvAYupiMSFgEj5Hem7x

Lui reste-t-il la moindre dignité, à celui dont les ossements sont à présent exposés aux quatre vents ? Quand la rouille pare son heaume de tâches ingrates, avant d’y creuser des frises irrégulières, et que son épée semble plus émoussée que jamais.

Sa plaque ne dit plus rien. J’ai beau faire parcourir mes doigts sur les entrelacs de pierre, recouverte de lichens, impossible de déchiffrer le moindre mot.

Ce n’est qu’une tombe dispersée comme une autre, voilà tout. Certaines sont plus ostensibles que d’autres. Les vivants s’en soucient pour un temps. Mais les morts s’en moquent probablement.

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toujours aussi agreable a lire :ok_hand:

Le testament d’Hameya

C’est une de ces rencontres impromptues qu’on fait souvent, dans les régions hostiles. Le jeune humain – j’ai déjà oublié son nom – veut juste un peu d’aide pour explorer une crypte. J’ai proposé mes services contre une pièce d’or, payable d’avance, et la totalité du butin en étoffes runiques. Il n’a pas marchandé une seule seconde. Ces paladins sont vraiment des pigeons.

Je ne vais pas cracher sur un contrat facile, surtout par ici. Les Maleterres de l’Est sont littéralement infestées de morts-vivants, et ces choses-là ne sont pas ma tasse de thé.

Au sud de la région, les trolls Écorchemousse ont succombé au Fléau, comme tant d’autres. Groupés autour d’un vieux cimetière, ils tombent sans trop de difficulté, tant que nous parvenons à les assaillir un par un. Bon, sauf quand le boulet recule un peu trop, sans se rendre compte que ses pas l’amènent droit dans le champ de vision d’un autre zombie… et nous voilà avec deux monstres à combattre.

Mais nous nous en sortons sans trop d’écorchures. Un paladin, c’est crétin, mais quand même assez polyvalent, je dois le concéder.

Non, Jojo-la-piété, ça fait deux fois que je te le répète, je ne peux pas assommer ces créatures ! Cherche pas, c’est comme ça. Faudra les buter comme elles viennent, et je suis sûre que tu es assez solide pour encaisser.

Nous descendons prudemment les marches du tombeau. Le vol à la tire sur les occupants des lieux s’avère plutôt lucratif. Je n’en pipe évidemment pas un mot à mon compagnon. Chacun sa récompense : lui la gloire, moi l’argent.

Une fois atteinte la chambre funéraire la plus basse, nous faisons face à Zaeldarr, ainsi que plusieurs de ses congénères, dont Bidule-à-la-masse-brillante veut la peau. Le combat est brouillon. Chaotique, même. Nous nous en sortons de justesse. J’empoche mon butin, tandis que l’autre tranche joyeusement la tête du chef défunt. Je pensais qu’il aurait plus de classe et de dignité que ça. C’est vraiment dégueu’. Venant d’un paladin, j’entends.

Je repère un rouleau de parchemin, dans un coin de la pièce. L’autre rigolo s’enfuit d’une manière un peu précipitée, presque sans dire au revoir. Excellent ! Je vais pouvoir regarder ça de plus près sans avoir à partager.

https://drive.google.com/open?id=1HcvMn44gCqDWGm0PTp746cU_a_mVvr55

Le parchemin déchiré est couvert d’une écriture malhabile et pleine de fautes. J’ignorais qu’il existait des trolls lettrés ! L’un des Écorchemousse, avant que son esprit ne sombre définitivement sous la coupe du roi-liche, a eu le temps de révéler son itinéraire et la destinée de ses richesses.

Je veux bien pleurer sur le sort de la petite Pamela, non loin à Comté-de-Darrow, mais certainement pas sur celui d’un vulgaire Amani qui a bouffé de la viande avariée ! Cependant, je peux bien répondre aux dernières volontés de son testament, puisqu’il m’indique si gentiment l’emplacement de ses possessions.

Quittant le caveau, je me fonds dans les ombres et contourne le bâtiment. Conformément à ce qu’a écrit Hameya, j’avise un vieux chariot de bois abandonné, et fouille aux alentours. Un tas de terre fraîchement retourné m’indique l’emplacement du trésor. C’est presque trop facile…

Mais ce coffre est scellé ! Saleté de troll ! Tous mes efforts pour le crocheter s’avèrent vains. Moi qui me prétendais la meilleure cambrioleuse de tout Kharanos, à une époque pas si lointaine… Heureusement que le paladin n’est plus là. Il se serait bien foutu de ma gueule. Et évidemment, c’est bien trop lourd pour que je tente de trimballer ça.

Je ne vois plus qu’une solution : aller chercher la clé. Où a-t-il écrit qu’il se rendait, déjà, le cadavre ambulant ? Ah, oui… Zul’Mashar.

Je déroule ma carte… Bon sang ! Il va falloir traverser toutes les Maleterres ! Hors de question de sortir le mécanotrotteur. Trop peu discret. Va pour l’approche lente, d’ombre en ombre. Ça va prendre des plombes, mais, au moins, ça sera sûr.

Après une marche d’approche qui semble avoir duré des heures, je finis par atteindre la passe de Zul’Mashar. Les cannibales et les chasseurs des ténèbres locaux ne sont pas encore contaminés, et ils en paraissent d’autant plus féroces. Je louvoie à bonne distance des patrouilles et des sentinelles. Je ne composerai qu’un vulgaire amuse-gueule, s’ils me mettent la main dessus.

Après le col, j’atteins un cirque où une gigantesque pyramide amani occupe presque tout le paysage. À ses pieds, un non moins gigantesque cimetière de tombes fraîches. Je ne sais si c’est la pluie battante, ou bien la perspective de ce qui se déroule ici, qui me fait autant frissonner.

https://drive.google.com/open?id=1h6qIyZ_ohma2EEk3qfjNtFNVILIbudav

À distance, j’observe chaque troll avec attention. Je finis par en identifier un, déambulant, solitaire, recouvert de bandelettes et l’air bien plus défraîchi que ses comparses. Ce doit être mon infiltrateur.

Je m’approche autant que possible, et tâche d’attirer son attention sans éveiller celle des autres. Le corps-à-corps est rude, mais je remporte tout de même la victoire. Fouillant entre les plis du linceul d’une main, me pinçant le nez de l’autre, je cherche, profondément dégoutée, l’endroit où il aurait pu conserver la clé de son coffre. Autour de son cou, sous une chemise en grande partie décomposée, suspendue à une ficelle recouverte d’une épaisse couche de crasse, je déniche enfin une petite clé métallique.

Ne traînons pas dans le coin. J’empoche ma trouvaille, et quitte aussi vite que possible cet endroit de sombre augure.

La route du retour vers le caveau de Zaeldarr est aussi longue qu’à l’aller, mais j’y retourne cependant avec le sourire aux lèvres, songeant à toutes les richesses qui m’y attendent. Maintenant que j’y pense, j’ai complètement oublié de reboucher le trou ! J’espère que personne n’est passé dans le coin durant mon absence. Ça me rendrait malade d’avoir été doublée bêtement pour une telle faute d’inattention. Je ne dois jamais plus réitérer une telle bourde !

Heureusement, les morts-vivants Écorchemousse semblent avoir bien monté la garde. Le monticule de poussière n’a pas bougé d’un iota, et le coffre est toujours là.

https://drive.google.com/open?id=1-sU4OE2KF2AUFsexISkqFv_aV7kB2U6n

Je sors la clé d’un geste fébrile, et actionne la serrure, qui, cette fois-ci, ne fait aucune difficulté pour s’ouvrir. Et bé ! On peut dire qu’il ne s’est pas foutu de ma gueule, le troll. Promis, désormais, je les respecterai un peu plus, ces bestiaux. Enfin, si j’y pense !

Aux portes de Grim Batol

- Drumsted Rage-acier, du clan Marteau-Hardi. Je viens pratiquer un holocauste. Faisons équipe ?
- Buchette Clamesac, de Forgefer. Je viens dépouiller les cadavres. Ne vous déplaise, je fouillerai aussi le vôtre si vous veniez à périr.
- Charmant, mais conclus.

Les présentations sont laconiques. Le nain a un sourire en coin. Je sens qu’on va s’entendre.

J’étais venue tuer quelques dragonnets cramoisis dans les Paluns. Une rumeur anodine de bestioles peu farouches, que l’on pouvait parfois apprivoiser, puis revendre à prix d’or, m’avait mis la puce à l’oreille. Je voulais tenter ma chance.

Ma méthode, en général, c’est la finesse. Approcher en silence dans le dos de la cible, frapper d’un geste vif pour lui sectionner les nerfs les plus sensibles, ou trancher ses cordes vocales, danser autour de l’adversaire pour esquiver ses tentatives maladroites de riposte, puis assener le coup fatal, avant d’amortir sa chute, pour limiter le bruit. Enfin, lorsque le terrain s’y prête, camoufler le corps sous des broussailles ou dans la bourbe, pour limiter les risques d’alerte.

https://drive.google.com/open?id=1_knk8I7ocRFtpoM8dFD2NcA4U-8Z2V_7

À l’entrée des portes des Gueules-de-dragon, un remue-ménage criard perturbe ma chasse. Un tourbillon de cuir et d’acier fonce d’un draconide au suivant. Deux pieds de barbe pour 4 pieds sous le menton, presque aussi large que haut, les muscles saillants, les phalanges crispées sur une gigantesque hache à deux tranchants, qui vole allègrement à va et à vient, à travers les écailles des wyrms pourtant solidement protégées, le guerrier semble emporté par une frénésie confinant à la folie.

C’en est fini de ma tranquillité.

Je passe d’un monticule de dragons décapités au suivant, récoltant quelques piécettes que le combattant n’a pas l’air de considérer avec intérêt. J’arrive au dernier tas, et patiente tranquillement qu’il termine sa dernière proie. Je projette une dague de lancer sur la victime, par pure courtoisie, juste avant que le nain ne lui fasse rendre le dernier soupir.

La tornade de guerre se retourne tranquillement, sans inquiétude, ni signe de fatigue apparent. Des anneaux de bronze cliquètent dans ses cheveux tressés. Une chemise verte et orange, tâchée de sang, s’enfile dans un rutilant pantalon de maille finement ajusté à sa corpulence. On reconnaît un vétéran au premier coup d’œil.

Après quelques mots, je laisse le porteur de hache prendre l’initiative. Il se débrouillerait très bien sans moi. Je soupçonne qu’il voulait juste un peu de compagnie. Ça m’arrange : il n’a pas l’air de porter la moindre attention du monde au butin.

Grimpant progressivement le sentier menant à Grim Batol, franchissant successivement les quatre portails brisés, nous nous désaltérons à l’occasion de quelques pauses courtes, mais régulières. Sa langue finit par se délier un peu.

Ancien enrôlé de l’Alliance, il était factionnaire à Dun Modr lorsque la Horde a déboulé dans les Paluns, durant la Deuxième Guerre. Sa brigade a été repoussée au-delà du viaduc de Thandol. Nombre des siens y sont restés, pour ralentir la progression des orcs. Lui, a eu peur de mourir. Il avait une famille. Aujourd’hui, il regrette d’avoir survécu. Comment pouvait-il savoir que les dragons rouges, asservis par l’ennemi, contribueraient à la chute fatale de Grim Batol ?

Forgefer avait tenu bon. Pas la cité des Marteaux-Hardis. Tous avaient été massacrés. Civils comme militaires. Il n’a jamais su comment avaient péri sa femme et ses deux filles.

Depuis lors, tous les deux ans, il quitte le refuge des Hinterlands pour une expédition vengeresse sur les traces de ses amours perdues.

Les rares Plaiedécailles rouges, livrés à eux-mêmes et déboussolés, ne font pas long feu sous nos coups. Mais le temps passe vite, et nous arrivons au sommet, à l’approche du crépuscule.

https://drive.google.com/open?id=1t1fmgx_x_51kwmPN3RP1-8QJI2j9Yj-_

Si tous les autres nains semblent avoir abandonné l’espoir de reprendre la ville souterraine, Drumsted, lui, refuse de se faire une raison. Mais, à chaque voyage solitaire, comme aujourd’hui, il atteint les portes, que nous ne parvenons pas à forcer. Un silence de mort règne ici.

À quand cela remonte-t-il ? Dix ans ? Quinze ans ? J’ai l’impression, tout comme lui, que c’était seulement hier. Pourtant, la nature a repris ses droits. L’herbe a repoussé, dans la plaine autrefois brûlée par le feu des dragons. Peu ou pas de vestiges des combats féroces qui se sont déroulés ici. Il pourrait aussi bien ne s’être jamais rien passé.

Peut-être, en creusant un peu, pourrait-on mettre la main sur les arceaux rouillés d’un tonneau de poudre, ou quelques ossements noircis de ceux qui ont défendu l’endroit en pure perte ?

https://drive.google.com/open?id=1vbwBE92hN6W3GO6LOnHA9fUZWdArRNv6

Avant de nous quitter, Drumsted me fait une curieuse proposition : « Si vous passez par les Hinterlands, mademoiselle Buchette, n’hésitez pas à faire halte au Nid-de-l’Aigle. La table y est bien garnie, et une dague bien maniée et un esprit vif seront toujours recrutés avec plaisir. »

Les nains des collines n’ont rien perdu de leur sens de l’honneur. Mais il leur reste encore bien des terres à reconquérir.

Je n’ai pas prévu de détour par le nord prochainement. Mais peut-être, un jour, qui sait…




Ou, comme dirait l’autre, de manière bien plus directe : le < Clan Wildhammer > recrute !

Le drapeau de Lordaeron

La foudre tombe derrière moi, à quelques pas à peine. Je manque de tomber de mon mécanotrotteur. Je me retourne. Un nuage de poussière noire se soulève, à l’endroit précis où je me trouvais, il y a encore un instant. La dépouille de la hyène Raillecroc que je viens juste de tuer a été littéralement carbonisée sur place lors de l’impact. Si j’avais traîné une minute de plus pour lui dépecer les joues, j’aurai fini noircie instantanément… Brrrr…

Cette région me donne la chair de poule. Le ciel menace en permanence de s’abattre sur vos têtes. Les créatures locales sont décimées par des chasseurs avides de composants convoités, et le gigantesque portail, de sinistre mémoire, laisse toujours planer le sombre souvenir des invasions d’Azeroth.

Il n’y a bien que l’appât du gain qui peut me faire rester pour une durée déraisonnable dans ce coin maudit. Dans le nord, une couple elfes de sang propose ses tonifiants magiques et ses drogues énergisantes à qui voudra bien leur rapporter toutes sorte d’extraits d’animaux. Gésiers de vautours, poumons de sangliers, cerveaux de basilics, et j’en passe. De quoi tester la résistance des cœurs sensibles, qui n’ont d’autre choix que de retourner la tripaille des monstres qu’ils abattent. Répugnant. À croire que cette région n’attire que les tarés de la pire espèce.

https://drive.google.com/open?id=1WJfYsCRVaE_s-aE4pkfutxz8382ve6fG

Ce n’est pas tant de mettre les mains dans des viscères, qui me dégoûte, que de savoir que Lynnore et Drazial utilisent ça dans leurs décoctions et leurs mixtures, pour améliorer les performances de ceux qui sollicitent leurs services.

J’avoue avoir testé leur poudre de scorpok terrestre. Pas mal, mais onéreuse.

Non, définitivement, je préfère massacrer la rare faune locale et féroce, pour revendre les abattis aux plus offrants.

Les vautours sont ma cible favorite. Entre leurs plumes, leurs gésiers et leurs serres, j’ai de quoi contenter une demi-douzaine de clients. Les œufs géants, je les garde pour moi. J’ai une recette spéciale pour les assaisonner, qui fait passer le goût rance qui imprègne ces créatures et leurs restes. Un vrai délice !

J’ai même le souvenir d’avoir trouvé un fragment de draenéthyste imparfait, un jour, coincé sous une de leurs griffes. Un simple petit éclat turquoise, de la taille d’un ongle, qui brillait vivement malgré la faible lumière. J’en ai retiré un bénéfice plus que substantiel. J’ai beau savoir que ce n’est pas rationnel, depuis, je ne traverse jamais la zone sans décimer tous les racleurs-d’os du coin, même s’il m’en coûte un détour.

Je grimpe les hauteurs, pour mieux repérer les zones de charniers, qui forment l’habituel point de ralliement de ces rapaces. Je distingue, au loin, le contour du portail vers Draenor, que je me suis promise de ne jamais traverser.

https://drive.google.com/open?id=1BBnGT03Hv1LzRKLfgB0l-vusD2bC0VxD

Rappelles-toi bien ça, Buchette. Chez les Clamesac, on ne change jamais d’avis, même quand on a tort. Surtout quand on a tort. Ça rend prévisible, certes, mais fiable. Et la fiabilité, c’est une vertu qui se perd.

Je me rappelle ces mots de mon oncle adoptif. Quitte à passer pour une tête de mule, autant l’assumer jusqu’au bout. Je ne connais personne qui soit revenu du passage au-delà de cette porte dimensionnelle. Je ne suis pas folle au point de prendre de tels risques. Et pas altruiste au point de me dire qu’un tel sacrifice préservera Azeroth. Qu’est-ce qu’on a pu en entendre, des conneries de cet acabit, depuis quelques décennies…

En parlant de conneries…

Je reste inattentive une seconde, et un sanglier infernal me charge. Cette saloperie abîme les rouages inférieurs de mon mécanotrotteur et me désarçonne. Je vais le défoncer !

J’observe la bête et repère les points faibles de ses articulations, entre les dangereuses cornes dorsales. Un surinage en règle pour me donner le temps de réfléchir. Je contourne, frappe sournoisement les jonctions des tendons de ses pattes arrières, avant d’esquiver de justesse un coup de défense de la créature sortant de sa stupeur. Elle pensait me prendre en traître : c’est moi qui vais la dépecer dans les règles de l’art. En moins d’une minute, le cochon démoniaque se vide de son sang, affalé sur le flanc, contre la terre ocre et desséchée. Ma veste totalise plusieurs nouveaux accrocs. Zut !

Un bout de tissu déchiqueté est accroché à une de ses piques. Je le décroche et l’inspecte. Je reconnais les couleurs et les symboles. Il ne reste plus grand-chose de l’Alliance de Lordaeron, par ici.

Une guerre trop tôt ou une guerre trop tard. Des cadavres, des armes de siège détruites, des tombes à n’en plus finir. J’ai longuement écumé la région. Les seuls souvenirs à peu près vaillants qui rappellent la gloire dont ces combattants se paraient, ce sont sept petits drapeaux. Sept ridicules petits drapeaux – pas un de plus, pas un de moins – dispersés dans toutes les Terres foudroyées.

https://drive.google.com/open?id=1usmu4HwHS_gTcxQkGgHtED1ECTY9rQe4

Enfin, sept… J’avoue, le dernier que j’ai repéré se situe à l’entrée de la Balafre impure. Peut-être s’en trouve-t-il d’autres au-delà ?
Qu’on ne compte pas sur moi pour aller vérifier. Ceux qui s’aventurent dans ces terres envahies par les démons ne reviennent jamais entiers. Les plus chanceux y laissent seulement un œil ou un bras. D’autres y laissent leur âme.
Merci bien, mais très peu pour moi.